Développer son storytelling et ses compétences sociales

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Léo Babauta interviewe son ami Tynan, auteur d’un livre qu’il trouve fantastique intitulé « Superhuman Social Skills » (que l’on pourrait traduire par « Compétences sociales surhumaines »).

Babauta conseille ce livre à ses propres enfants, et estime que tout le monde devrait le lire. Selon lui, le contenu nous permettrait de nous transformer en « ninjas sociaux », bons pour évoluer dans n’importe quelle situation sociale, pour raconter une histoire captivante face à une foule en restant à l’aise… En bref, de développer « les compétences sociales les plus importantes pour parler aux étrangers, pour se faire des amis incroyables. »


Interview de Tynan par Léo Babauta

Tynan

Tynan

Q : Selon toi, qui a besoin d’aide dans ses compétences sociales ?

R : Je pense que nous pouvons tous améliorer nos compétences sociales d’une façon ou d’une autre.

Pour certaines personnes cela pourrait être contreproductif, mais je pense que ce n’est pas le cas de la plupart d’entre nous.

Comme on ne nous apprend pas les compétences sociales dans les voies d’enseignements traditionnelles, que ce soit à l’école ou avec nos proches, la plupart des gens ne travaillent pas activement sur leurs améliorations.

Cela signifie que beaucoup d’entre nous avons une énorme marge de progression, sur laquelle nous pouvons capitaliser via un apprentissage proactif.

Q : Pourquoi est-ce que c’est un problème aussi difficile à résoudre ?

R : On pense trop souvent que les compétences sociales sont davantage des aspects personnels qui relèvent de l’inné  et moins des compétences que l’on peut apprendre, comme jouer du piano.

Il y a également beaucoup d’ego qui entre en ligne de compte. S’améliorer nécessite souvent un certain niveau d’humilité qui peut être inconfortable à certains.

Un autre effet de cet inconfort est que les gens ne parlent pas de leurs compétences sociales. Si vous et moi apprenions tous les deux la programmation, nous parlerions de nos défis et partagerions des ressources.

Mais en ce qui concerne les compétences sociales,  on observe pas vraiment de partage.

Q : Comment est-ce que tu as résolu cela ? Quels changements as-tu vu dans ta vie suite à cela ?

R : La première grande étape pour moi a été de m’engager dans la communauté des « pick-up artists ».

(Note de traduction : Un pick up artist, abrégé couramment en PUA est un homme habile à rencontrer, attirer et séduire les femmes. Le terme vient de l’anglais américain, signifiant littéralement « artiste de la drague ». En France, le terme PUA offre une alternative au terme « séducteur » (source Wikipedia)).

J’étais un nerd introverti qui n’avait aucune idée de la façon dont il fallait s’y prendre avec les femmes, et cela m’a poussé à être plus humble et à développer mes compétences sociales en partant de zéro.

J’étais concentré sur le fait d’obtenir et de réussir mes rendez-vous, mais j’aurais pu bénéficier d’améliorations dans d’autres domaines, comme se faire des amis ou interagir avec ma famille.

Mon expérience de pick-up artist m’a aidé à voir les compétences sociales comme une chose qui pouvait être améliorée, et j’ai commencé à voir les choses comme se faire des amis, raconter des histoires, et interagir avec mon groupe d’amis avec la même posture mentale.

Q : Il y a des tas d’astuces dans ta vie. Par où commencer ?

R : Je pense que cela varie d’une personne à l’autre.

Nous avons tous nos forces et nos faiblesses, et la distribution de ces forces et faiblesses pourrait sembler assez uniforme. Mais pour quelqu’un qui n’a pas une bonne idée de ses faiblesses, je suggèrerais de travailler soit sur le storytelling soit sur l’identification de ses mauvaises habitudes.

Le storytelling est une compétence universelle qui peut avoir un impact énorme sur les autres, et les mauvaises habitudes font souvent la différence entre une amitié qui naît ou ne naît pas.

Q : Sans dévoiler le contenu du livre, peux-tu partager quelques astuces pour devenir un meilleur storyteller, un meilleur conteur ?

R : Je ne suis pas sûr d’avoir jamais rencontré quelqu’un qui fait des histoires trop courtes. J’en ai rencontré beaucoup qui racontent des histoires bien trop longues.

C’est amusant de raconter une histoire, donc nous avons tous tendance à savourer cela et à le faire durer aussi longtemps que possible.Pourtant, en réalité c’est mieux de raconter aux gens les morceaux juteux d’une histoire puis de passer à autre chose. Ils le demanderont toujours s’ils veulent plus d’informations.

Dites-en le minimum dans l’introduction, faites monter la tension, puis frappez-les avec les retombées de cette histoire.

Souvenez-vous que si vos histoires sont trop longues, que ce soit à cause des tangentes, des répétitions, ou de trop de détails, les gens ne voudront plus entendre d’autres histoires à l’avenir parce qu’ils craindront que vous n’arrêtiez jamais de parler.

D’un autre côté, si vous faites toujours en sorte que vos histoires soient courtes et agréables, on vous demandera d’en raconter d’autres.

Q : Quelles sont les mauvaises habitudes les plus récurrentes chez les gens, et dont ils n’ont peut-être même pas conscience ? Comment est-ce que quelqu’un prend conscience de ses mauvaises habitudes ?

R : Je pense que les mauvaises habitudes les plus communes viennent d’une incompréhension du flux naturel de la conversation. Je suis toujours surpris par le nombre de gens qui dominent les conversations sans recevoir la moindre indication que l’autre personne est heureuse de simplement rester assise et d’écouter passivement.

En règle générale, vous devriez être prêt à remplir n’importe quel temps mort dans la conversation, mais vous devriez permettre à l’autre personne de parler autant qu’elle le veut. Une conversation entre deux personnes qui ont du bon sens au niveau realtionnel va toujours être proche d’un temps de parole équitable pour chacun des deux.

Q : Pourquoi est-ce que tu penses que le storytelling est une super compétence sociale ?

R : Les histoires sont les moyens par lesquels nous communiquons nos expériences, et nos expériences nous ont façonnés et nous ont permis de devenir qui nous sommes aujourd’hui.

Donc en racontant des histoires, vous communiquez efficacement qui vous êtes en tant que personne, et comment vous êtes devenu cette personne. Pour devenir vraiment ami avec quelqu’un, vous ne pouvez pas vous contenter de partager des faits ou des opinions ; vous devez vous partager vous-même, et la façon de s’y prendre, ce sont les histoires.

Q : Si on est nul pour raconter des histoires, comment s’entraîner et devenir bon ? Y a-t-il un moyen de s’entraîner avec ses amis, ou avec des étrangers ? Comment avoir de bonnes informations en retour et s’améliorer rapidement ?

R : Comme pour n’importe quoi d’autre, c’est uniquement une question de répétitions.

La clé est de réaliser qu’il n’est pas nécessaire qu’une histoire soit un conte épique qui pourrait finir en film ; il suffit que ce soit une chose qui vous soit arrivée.

Pensez à tous les comédiens qui font du stand-up. Ils racontent des histoires amusantes tout le temps, mais le contenu en lui-même n’a rien d’incroyable.

La valeur vient du partage de ces histoires. Donc dites à vos amis et à votre famille des choses qui vous sont arrivées. N’importe quoi qui a été amusant, intéressant ou inattendu.

Et si vous n’arrivez pas à trouver une histoire comme ça, racontez simplement des choses ennuyeuses qui vous sont arrivées, et essayez de les rendre intéressantes.

J’avais pour habitude de parler aux gens de mes courses à l’épicerie rien que pour m’entraîner à raconter des histoires.

Vous avez déjà des retours positifs à propos de vos histoires, mais vous l’ignorez probablement.

L’étiquette sociale implique que tout retour négatif soit transmis en niveaux de gris. Personne ne vous dira que votre histoire est nulle, mais ils changeront gentiment de sujet, vous interrompront, ou montreront des signes de désintérêt en coupant le contact visuel ou par leur langage corporel.

Q : Tu parles dans ton livre de faire une liste de ses histoires préférées de A à Z. Et si on pense ne pas avoir de bonne histoire à raconter ? Est-ce un signe que vous devez changer des choses dans votre vie ?

R : Je pense qu’il serait difficile de vivre vingt ans ou plus sans avoir au moins vingt-six expériences intéressantes à transformer en histoires. En réalité c’est quasiment impossible.

Si vous ne pensez pas avoir d’histoires intéressantes, c’est probablement que vous ne comprenez simplement pas ce qui rend une histoire intéressante. C’est 20% de contenu et 80% de transmission de l’histoire.

D’un autre côté, une fois que vous transmettez votre histoire à coup sûr, la plus grande marge de progression vient du contenu.

J’ai trouvé que le contenu de mes meilleures histoires vient des voyages et/ou des moments où je suis sorti de ma zone de confort, deux choses que n’importe qui peut faire.

Q : Comment peut-on dire si notre histoire ne passe pas bien ? Il semble que beaucoup de gens racontent des histoires ennuyeuses en pensant que l’autre personne est totalement intéressée, sans être conscients qu’ils parlent d’une voix monocorde. Et si on le remarque, que faire ? Et puis… comment trouver l’équilibre entre raconter une histoire, écouter et ne pas trop parler ?

R : Si ton histoire est vraiment bonne, les gens vont te regarder droit dans les yeux, montrer des émotions, et poser des questions ou dire des trucs comme « Sérieux ?! ». Si tu n’observes pas ces signes, il faut partir du fait que l’autre personne n’est pas intéressée. Cela pourrait ne pas être vrai, mais c’est bien mieux de croire par erreur que la personne n’est pas intéressée que l’inverse.

Il y a un test facile que tu peux faire si tu penses que quelqu’un n’est peut-être pas intéressé : arrête simplement de raconter ton histoire. Trouve n’importe quelle distraction, et sers-toi de cette occasion. Ou dis simplement « Bref, c’est une longue histoire. »

Si la personne veut que l’histoire s’arrête, tu viens de lui donner ce qu’elle veut. Si elle veut entendre le reste de l’histoire, elle te demandera à tous les coups de continuer.

Cette technique fonctionne à chaque fois et fait de toi quelqu’un avec qui il est agréable de parler.

Tes histoires devraient être courtes et modulaires. Pas de conte épique avec des millions de tangentes et d’histoires parallèles, uniquement des histoires courtes et concentrées.

Raconte une histoire, donne l’opportunité à l’autre personne de raconter sa propre histoire, change de sujet, ou pose une question, et si cela ne prend pas, passe encore à autre chose.

En règle générale, Tu veux être aussi flexible que possible, mais laisse l’autre personne être inflexible. Donc si elle veut parler 100% du temps ou 0% du temps, tu la laisses faire et rends cela aussi agréable que possible.

Q : Disons qu’on entre dans une soirée, ou dans un bar. Comment en arriver au moment où vous pouvez commencer à raconter une de vos histoires à des étrangers ? Je me sens toujours un peu mal à l’aise quand j’entre dans un endroit et que je ne sais pas comment aborder un étranger ou un groupe de personnes et simplement commencer à parler.

R : Une bonne combinaison est : une question couplée à une histoire. Par exemple, disons que vous êtes à la soirée de votre ami Bob. Vous pourriez demander aux gens comment ils ont connu Bob, ce qui est une bonne façon de briser la glace pour tout le monde, puis d’enchaîner avec une super histoire à propos de la façon dont vous vous êtes rencontrés.

S’ils se lancent dans leur propre super histoire suite à votre question, vous n’êtes pas obligé de raconter la vôtre, mais s’ils ont une réponse très laconique comme « Oh, on s’est rencontré au travail », vous avez une bonne histoire en réserve.

Presque tout le monde se sent mal à l’aise dans ces situations, mais la plupart espèrent également avoir de supers conversations et rencontrer des gens. En s’entraînant aux compétences sociales et en se préparant à des situations comme celle-ci, vous pouvez en fait devenir une des personnes les moins nerveuses.

Q : Comment passer d’une histoire qu’on raconte à une vraie connexion et à la naissance d’une amitié ?

R : Dans une amitié vous avez besoin d’expériences partagées et de compréhension mutuelle. Les histoires sont un tiers de cette équation ; elles aident votre nouvel ami à vous comprendre. Pour les comprendre, vous devez savoir écouter. Même si l’histoire qu’on vous raconte est vraiment mauvaise, pensez à une opportunité d’apprendre à connaître la personne qui la raconte, avec ses défauts et tout le reste.

Racontez des histoires qui encapsulent une grande part de votre expérience en tant qu’humain, et encouragez l’autre personne à en faire de même. C’est comme cela que vous remplirez le canevas vide dans votre esprit avec des données vous permettant de les comprendre.

Les histoires seules ne peuvent pas créer une amitié, mais c’est un outil important que nous utilisons pour apprendre à nous connaître, et c’est un aspect majeur de l’amitié.

Une fois que apprenez à vous connaître l’un l’autre, passez du temps ensemble et créez vos propres histoires ensemble. Ces expériences partagées lient les gens et sont la base d’histoires que vous pouvez raconter aux autres par la suite.

Pour en savoir plus sur Tynan

Illustration : Flickr / Daniele Rossi – Storytelling

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