Deux physiciens de l’université de Rennes 1, Albert Le Floch et Guy Ropars, affirment avoir fait une découverte qui permet de mieux comprendre pourquoi des personnes sont dyslexiques et par conséquent de trouver de nouvelles voies pour les aider.
La dyslexie, qu’est ce que c’est ?
Pour mémoire, la dyslexie est un trouble qui touche près de 10% de la population mondiale soit près de 700 millions de personnes. Une de ses principales conséquences étant des difficultés à la lecture et à l’écriture (voir encadré ci dessous).
Définition de la fédération française des DYS : Il s’agit d’une altération spécifique et significative de la lecture (dyslexie) et/ou de la production d’écrit et de l’orthographe (dysorthographie).
Ces troubles apparaissent dès les premiers moments de l’apprentissage sous la forme d’une difficulté à maîtriser le stade dit alphabétique de l’apprentissage de la lecture.
Au stade suivant, le trouble se manifeste par une incapacité à mémoriser la forme visuelle des mots et à les reconnaître globalement (stade orthographique). Ceci entraîne une lecture généralement hésitante, ralentie, émaillée d’erreurs qui a pourtant exigé beaucoup d’efforts. L’orthographe, qui normalement se développe au fur et à mesure que s’automatise la reconnaissance globale des mots, est touchée.
La déficience liée à la dyslexie est d’intensité variable selon les individus. Elle peut être accompagnée de troubles du calcul, de la coordination motrice (et en particulier du graphisme) ou de troubles d’attention, avec ou sans hyperactivité.
Une question de symétrie trop parfaite des taches de Maxwell
Et si vous êtes dyslexiques, ce serait une question de symétrie trop parfaite de vos taches de Maxwell qui se trouvent dans vos yeux.
« Dans chaque œil, nous avons ce que l’on appelle une tache de Maxwell, du nom d’un célèbre physicien du XIXe siècle » explique Albert Le Floch. Une tache qui a la particularité de ne pas laisser la lumière bleue.
« Chez les gens non dyslexiques, ces taches ne sont pas les mêmes. Celle de l’œil directeur est parfaitement circulaire tandis que l’autre a plutôt une forme de patate diffuse. »
Une petite différence qui est loin d’être négligeable.
« Si par exemple vous regardez la lettre « b », votre œil directeur va parfaitement l’imprimer dans une partie de votre cerveau tandis qu’une image inversée fantôme, donc un « d », sera stockée dans une autre partie. Mais le cerveau ne tiendra pas compte de cette lettre fantôme. »
Sauf que les deux physiciens ont réussi à prouver que les dyslexiques ont, quant à eux, deux taches de Maxwell identiques et parfaitement symétriques.
« Ils n’ont donc pas d’œil droit ou gauche directeur et l’image fantôme de la lettre ne va pas s’effacer. » Le cerveau ne sait plus donc quelle lettre sélectionner.
Ils ont mené leur étude sur deux cohortes. L’une sur 30 étudiants dyslexiques et l’autre sur 30 étudiants non dyslexiques. A chaque fois, les résultats sont conformes à leurs observations.
Vers de nouveaux traitements
Les deux physiciens ont mis au point un système de lecture qui peut aider les dyslexiques.
« Nous avons compris ce mécanisme et également mis au point un système de lampe de lecture qui permet de corriger cette anomalie. Nous espérons que ça pourra déboucher sur de nouvelles approches de traitement de la dyslexie. »
La prudence critique de la Fédération Française des DYS
Dans un communiqué de presse, la Fédération Française des DYS explique :
« A ce jour, la Fédération Française des DYS n’a pas d’avis sur l’étude réalisée par
les deux physiciens à l’université de Rennes 1, Albert Le Floch et Guy Ropars, mais
appelle les médias et les familles à la prudence. La FFDYS a saisi son Comité Scientifique qui se chargera d’expertiser ces travaux et d’en évaluer la fiabilité et la validité. La FFDYS remettra à la presse son positionnement une fois délibération du Comité Scientifique faite.
Pour le moment, cette étude est difficile à apprécier car ses méthodes sont peu conventionnelles et celle-ci est déconnectée de tout le reste de la recherche sur la dyslexie. Elle ne peut de toute évidence pas expliquer les aspects phonologiques de la dyslexie qui concernent, selon les études, 60 à 95% des cas. Si la méthodologie se révèle fiable, ses résultats demanderont à être répliqués avant toute généralisation. Il faut donc relativiser cette nouvelle information et la replacer dans le contexte plus général des centaines d’articles scientifiques sur la dyslexie paraissant chaque année, sans pour autant parler de « découverte » ou de « mystère de la dyslexie percé à jour ».
Pour en savoir plus
Leur étude publiée dans la prestigieuse revue de référence The Royal Society.
Left–right asymmetry of the Maxwell spot centroids in adults without and with dyslexia –
le communiqué de presse de la Fédération Française des DYS
Fiche Wikipedia sur la Dyslexie
Pour comprendre ce que cela peut faire, voir la police d’écriture créée par le graphiste Daniel Britton qui montre à quel point il est difficile de former des phrases complètes lorsque les mots sont un défi à lire, c’est alors la même frustration pour la dyslexie.
Illustrations
Police de Daniel Britton
Portraits d’Albert Le Floch et Guy Ropars, physiciens à l’université de Rennes | Ouest-France.