Nellie Bly, pionnière du journalisme d’immersion

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Google célèbre aujourd’hui l’anniversaire de la naissance d’Elizabeth Jane Cochrane, dite Nellie Bly par un doodle mondial, qui prend la forme d’une animation retraçant le fil de sa vie bien remplie au rythme d’un titre composé spécialement par Karen O du groupe Yeah Yeah Yeahs.

Née le 5 mai 1864 à Cochran’s Mills (en) dans le Comté d’Armstrong (Pennsylvanie) et morte le 27 janvier 1922 à New York, Nellie Bly est une journaliste américaine, pionnière du reportage clandestin, une forme de journalisme d’investigation.

Nellie Bly, une multipotentielle ? C’est plus que probable !

Défenseur des pauvres et à la pointe de la dénonciation de la corruption, Nellie Bly a été une grande  figure du journalisme et une activiste politique. Le New York Press Club décerne régulièrement le prix Nellie Bly Club Reporter aux meilleurs travaux produits par des jeunes journalistes.

Nellie Bly perd son père, juge, à l’âge de 6 ans, qui avait épousé sa mère Mary Jane en secondes noces. Destinée à devenir demoiselle de compagnie, Nellie se refuse à ce destin et commence à écrire des poèmes et des récits à 16 ans. En 1880 (à 16 ans), elle part pour Pittsburgh chercher du travail.

Nellie Bly, une jeune fille au caractère bien trempé

En réaction à une rubrique sexiste du journal Pittsburgh Dispatch, elle écrit une lettre fielleuse au rédacteur en chef George Madden. La jeune fille a en effet été outrée par les propos ouvertement misogynes de l’éditorial titré « Ce à quoi sont bonnes les jeunes filles » et lui a adressé une missive musclée signée « L’orpheline solitaire ».

Elle n’imagine pas qu’elle pose alors la première pierre d’une incroyable carrière journalistique. Loin de s’attirer les foudres du patron de presse, Nellie Bly découvre quelques jours plus tard, dans le même journal, une annonce étonnante : le Pittsburgh Dispatch souhaite rencontrer « L’orpheline solitaire » pour discuter d’une éventuelle collaboration.

Madden lui offre un poste au journal si elle lui offre un article attractif. Quelques jours plus tard, elle lui soumet un article consacré à la famille, au divorce et aux enfants. Elle est alors engagée et Madden lui donne son pseudonyme, Nellie Bly, d’après une chanson très connue de Stephen Foster, pour protéger sa famille des critiques.

Nellie Bly, pionnière du journalisme d’immersion

Nellie_Bly-White_Slave-06Le premier reportage qui lui est confié concerne une fabrique de conserves.

Elle raconte alors la vie des ouvrières et leurs conditions de travail très difficiles, dans le froid, la saleté et le danger.

Ce premier reportage, accompagné de photographies, fait exploser les ventes du Pittsburgh Dispatch. Elle a alors rapidement le libre choix de ses articles et se concentre essentiellement sur les conditions de vie du monde ouvrier.

Malheureusement, les industriels commencent à mettre sous pression le journal. Madden demande donc à Nellie Bly de ne plus s’occuper que des rubriques théâtrales et artistiques.

Mais elle finit par le convaincre de revenir à son thème de prédilection, le monde ouvrier. Elle se fait alors embaucher dans une tréfilerie pour écrire un article « de l’intérieur ».

Le reportage fait sensation mais Nellie est de nouveau forcée par les industriels à revenir aux rubriques théâtrales.

Nellie Bly, écrivain

En 1886 (à 22 ans), elle part en voyage avec sa mère au Mexique et visite El Paso, Mexico, Guadalupe et Vera Cruz fournissant au journal des articles sur les mœurs et coutumes, la vie culturelle et artistique, la politique du pays.

Elle en tire son premier livre, Six months in Mexico (1888), dédié à Madden.

Nellie Bly et la folie simulée

Nellie_Bly-Mad-House-07Elle quitte le Dispatch en 1887 et se rend à New York (mai 1887), où elle pose sa candidature à plusieurs journaux de référence dont le journal à sensation, le New York World de Joseph Pulitzer.

Celui-ci la recrute après qu’elle eut semé le trouble dans les locaux et lui promet un contrat si elle parvient à s’infiltrer dans un asile.

Elle accepte cette mission d’immersion incroyable : feindre la folie pour intégrer l’asile de fous pour femmes, le Blackwells Island Hospital à Roosevelt Island et raconter de l’intérieur les mauvais traitements du personnel sur les patients.

 

Après une nuit d’entraînement, elle se présente à la porte du sanatorium et déroule sa partition. L’illusion est parfaite: tous les médecins la déclarent folle et se prononcent pour son internement. Nourriture avariée, eau souillée, bâtiments infestés de rats, bains glacés, patients battus : le tableau est d’une noirceur affolante.

Elle en ressort dix jours plus tard et raconte sous le pseudonyme de L. Munro les horreurs qu’elle y a observées dans un livre, Ten days in a Mad-House. La sortie fait la une de toute la presse et entraîne des changements drastiques dans l’organisation des hôpitaux psychiatriques.

Nellie Bly, taupe chez les narcotrafiquants

En 1887, John Cockerill, administrateur du New York World, lui demande d’écrire un article sur un narcotrafiquant célèbre Edward Phelps. Elle se déguise et entre dans l’entourage du trafiquant. Son travail permettra la traduction en justice de Phelps et de plusieurs grands noms de la scène politique américaine, bien qu’aucun ne sera condamné.

Nellie_bly_tour_du_mondeNellie Bly, recordwoman du tour du monde

En novembre 1889, Jules Chambers lui demande d’entreprendre un tour du monde sur les traces de Phileas Fogg, le héros du Tour du monde en quatre-vingts jours de Jules Verne.

Elle en avait émis l’idée à l’automne précédent,  mais le financier du New York World, George W. Turner, avait alors refusé de la soutenir, estimant qu’une femme était incapable d’un tel périple.

Ce n’est donc qu’un an plus tard qu’elle entame son voyage de 40 070 kilomètres à Hoboken, New Jersey, le 14 novembre 1889, à 9 heures 40 pour le terminer le 25 janvier 1890.

Ce voyage aura duré exactement 72 jours, 6 heures, 11 minutes et 14 secondes, le record de l’époque, battu quelques mois plus tard par l’excentrique George Francis Train.

Nellie Bly embarque ainsi à bord de l’Augusta Victoria de la Hamburg American Steamship Line, au port de Hoboken. Elle arrive à Southampton le 20 novembre où elle est accueillie par le correspondant du New York World, Tracey Graves.

Elle apprend de lui qu’une rencontre organisée par Robert Sherard, journaliste du New York World à Paris, est prévue avec Jules Verne à Amiens. Elle arrive en gare d’Amiens le 22 novembre à 16 heures et est accueillie avec enthousiasme par le célèbre écrivain accompagné de sa femme Honorine et de Sherard comme interprète.

Jules Verne la trouve jeune, jolie, mince comme une allumette et d’une physionomie enfantine. Elle est reçue dans le bureau de Jules Verne et rejoint rapidement son train de retour.

Elle atteint Calais de justesse et prend le train pour Brindisi. Après Suez, elle traverse la mer Rouge et arrive à Colombole 14 décembre. Le 18 décembre, elle est à Singapour où elle achète un petit singe. Les articles qu’elle envoie sur les lieux traversés obtiennent un succès prodigieux. Elle y étudie les mœurs et coutumes mais aussi l’extrême pauvreté rencontrée.

Des paris, tout comme pour le voyage de Phileas Fogg, sont ouverts aux États-Unis. À Hong Kong, Nellie Bly apprend qu’une autre journaliste, Elisabeth Bisland, a été envoyée par le Cosmopolitan Magazine pour la battre.

Le 3 janvier 1890, elle arrive à Yokohama où elle peut lire son interview avec Jules Verne, en japonais et le 7 janvier embarque sur le rapide vapeur Oceanic de la White Star Line pour rejoindre San Francisco le 20 janvier.

Pulitzer affrète ensuite des trains spéciaux pour son retour à travers les États-Unis. Elle arrive en gare de Jersey City le 25 janvier 1890 à 15 heures 51 après un périple de 72 jours, 6 heures, 11 minutes et 14 secondes.

Ses premiers mots sont :

« Je suis contente d’être de retour à la maison » (I am glad to be home again).

Le jour même, Jules Verne est informé par une dépêche de la réussite du voyage. Il répond dans l’Écho de la Somme :

« Amiens, 25 janvier
Jamais douté du succès de Nellie Bly, son intrépidité le laissait prévoir.
Hourra ! Pour elle et pour le directeur du World !
Hourra ! Hourra ! »
— Jules Verne

Elle devient la première femme à faire le tour du monde sans être accompagnée par un homme, une aventure qu’elle raconte dans le livre « Le Tour du monde en 72 jours », un livre devenu un classique de la littérature journalistique.

Nellie Bly, chef d’entreprise

Rencontré lors d’une réception à Chicago, le 5 avril 1895 (à 31 ans), elle épouse le millionnaire Robert Seaman et s’éloigne du journalisme.

Après la mort de son mari en 1904 (à 40 ans), elle prend la direction de ses entreprises et instaure de nombreuses réformes (salaire journalier, investissement dans des centres de loisirs, des bibliothèques pour les ouvriers, etc.).

Désavouée au sein même de l’entreprise, elle doit vendre les usines en février 1914 (54 ans).

Nellie Bly, correspondante de guerre

Poursuivie par les créanciers, elle retourne au Royaume-Uni et prend contact avec le New York Evening Journal pour devenir correspondante de guerre lors de la Première Guerre mondiale, articles qu’elle republie sous le nom de Nellie Bly qu’elle avait abandonné au moment de son mariage.

Nellie Bly, militante pour le droit de vote des femmes

Après la guerre, de retour à New York, elle reprend ses articles sur le monde ouvrier, sur l’enfance et œuvre pour le droit de vote des femmes.

À l’âge de 57 ans, elle meurt le 27 janvier 1922 d’une pneumonie au Saint Mark Hospital de New York.

Le lendemain de sa mort paraît un article sur la meilleure journaliste d’Amérique,

Pour en savoir plus :

Le doodle de Google

Accès à la vidéo (ouverture dans nouvel onglet)

Nellie_Bly_Doodle_Google

Ses écrits en anglais

sur Amazon

Site qui lui est consacré

www.nellieblyonline.com ( en anglais)

Articles qui lui sont consacrés

Fiche Wikipedia sur Nellie Bly

Article de Le point sur Nellie Bly

Article de rtl.fr sur Nellie Bly

 

Illustrations

 Bibliothèque du Congrès des États-Unis H. J. Myers, photographer 

Frank Leslie’s Illustrated Newspaper, from sketches by C. Bunnell.

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Auteur

Brigitte Roujol est la fondatrice des sites HORIZOOM et COACHING AVENUE. Elle se considère comme un Esprit Renaissance du 21ème siècle. Elle a en effet eu de multiples vies professionnelles, se réinventant régulièrement. Aujourd'hui, un pied en entreprise, un pied à l'extérieur, elle est consultante en créativité, innovation, spécialiste de la réinvention (de soi, de modèle économique), auteur, coach d'Esprits Renaissance et d'Innovateurs, et maître-verrier à ses heures perdues... Pour la contacter

Un commentaire

  1. Rétrolien: Exemples de multipotentiels | HORIZOOM

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